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S.D.F.

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De la burle aux alizés

Saltimbanques Des Flots

 LES GALÁPAGOS, ESCALE DE LUXE.

Une navigation de sept jours nous permet d'arriver sur l'île de San Cristobal, dans l'archipel des Galápagos.
Ces îles sont situées à un millier de kilomètres à l'ouest des côtes équatoriennes, elles font partie du patrimoine mondial de l'Unesco.
Nous longeons l'île au petit matin : la lune, éclipsée par Vénus, joue à cache-cache derrière Kickers -Rock, les raies nagent tranquillement, souvent par deux, la mer est calme, sans ride, et nous profitons de cette fin de navigation, moment magique d’harmonie et de contemplation, d’admiration de cette nature qui nous comble chaque jour davantage.

Cependant, dès notre arrivée, nous sommes assaillis par un agent officiel, qui nous décharge de plus de six cent euros en entrées de parc national, taxes de port, frais de contrôle sanitaire et autres paiements en tout genre.
Un membre du ministère de l'agriculture fouille le bateau, inspecte les cales, lorgne le réfrigérateur et nous oblige à presser tous nos citrons, pamplemousses et oranges panaméens restants, de peur que nous apportions, sur l'île, la mouche du fruit.
Notre certificat de fumigation est faux, nous l'avons acheté au Panama et, évidemment, ce charmant monsieur aperçoit deux ou trois insectes morts dans le fond des cales, mais nous multiplions les sourires et les courbettes et ne sommes pas pénalisés, ouf!

Ce vilain moment passé, nous irons de bonnes surprises en agréables rencontres.
Si le gouvernement équatorien ne se montre pas très favorable aux vagabonds de la mer, incontrôlables, indisciplinés, peu dépensiers en général,  les habitants de l'île sont d'une gentillesse et d'une serviabilité exemplaires. La vie à terre est peu onéreuse, un repas au restaurant ne coûte que trois dollars, avec le jus de fruits, la soupe et le plat complet.
Nous irons même chez le coiffeur pour quelques dollars, les belles boucles d’or de Patrick resteront aux Galápagos.
Nous nous habituons à ce mouillage sans annexe, et hélons  un " water-taxi"' au gré de nos besoins de déplacement. Le trajet coûte un dollar, mais Patrick s'aperçoit vite que les locaux ne le paient que cinquante centimes. Et, à partir de ce moment, le jeu consistera à donner les cinquante centimes d'un air convaincu, et la partie sera gagnée!

Pour l'achat de gasoil, bien évidemment, nous ne passerons pas par les autorités compétentes et, de nuit, une barque nous apportera, tous feux éteints, des bidons que les garçons transvaseront bien vite, ni vus, ni connus. Quel plaisir de griller les réseaux d'intermédiaires officiels et quelle économie! Une délicieuse omelette au rhum, partagée avec Cathy et Gilles, clôturera cette soirée excitante!
Nous avons besoin d'un guide pour aller plonger car nous n'avons pas le droit de plonger seuls dans le parc national, cela est formellement interdit et, en plongée et en général, nous respectons les lois.
Ce sera Martin, charmant jeune homme plein de bonne volonté et cherchant à nous satisfaire, qui nous accompagnera à Kickers-Rock, lieu de plongées célèbres et connues par tous les amoureux de faune sous- marine.
Malgré l'eau à  18 degrés, refroidie par le courant de Humbolt, nous nagerons avec les otaries, joueuses et agiles, nous plongerons avec les tortues immenses, les raies, les requins marteaux et autres, nous passerons dans un goulet étroit, faille entre deux immenses blocs, balayés  par le ressac et la houle, emportés par le courant, nos admirerons des étoiles de mer de toutes couleurs, des oursins crayons ...
C'est le moment pour moi d'étrenner  ma combinaison semi-étanche, sans m'arracher les oreilles et le nez en l'enfilant, et surtout en l'ôtant, et d'en apprécier tout le confort. Patrick grelotte et je n'ai pas froid, voilà une situation pour le moins inédite!
Ces plongées sont magnifiques, l'eau est moins limpide qu'à Malpelo, mais les poissons sont nombreux et les rencontres avec les otaries nous enchantent énormément !
Nous sommes toujours en compagnie de Cathy et Gilles, voilà pourquoi vous avez encore droit à de superbes photos sous-marines.

Si la vie aquatique est riche, la vie terrestre en est de même. Ces dix-neuf îles et quarante îlots n'ont pas été habités avant le seizième siècle et la faune et la flore y sont restées intactes depuis des millénaires. Vingt-huit espèces d'oiseaux n'existent que sur l'archipel : albatros, manchots, fous à pattes rouges ou bleues, frégates, mouettes de lave et plus d'une dizaine d'espèces de pinsons de Darwin.
Ici, vivent des iguanes terrestres dépassant  parfois un mètre de long, des iguanes marins qui descendent jusqu'à douze mètres de profondeur et parviennent à ralentir leurs battements de cœur pour demeurer près d'une heure sous l'eau. Onze espèces de tortues souvent centenaires, pouvant atteindre deux cent cinquante kilogrammes, vivent sur les différentes îles.
Les botanistes du monde entier viennent aussi étudier la flore extrêmement diversifiée, comprenant un bon nombre de curiosités.

Notre bateau est le refuge d'otaries et de lions de mer dont certains pèsent jusqu'à deux cent cinquante kilogrammes. Passée la joie des premières visites, nous chassons ces bestioles avec précaution, leurs odeurs et les traces de gras qu'elles laissent sur la coque ayant raison de notre patience. Sur chaque jupe, un tabouret et des pare-battages sont installés mais, têtues, les otaries forcent les barrages et viennent prendre le soleil, couchées sur le dos, les moustaches frétillantes, et les yeux dans le vague!

Nous restons deux semaines sur cette île, admirant les paysages volcaniques, déserts, les rochers peuplés de crabes rouges et autres animaux endémiques.

Mais l'heure du départ pour la grande traversée approche, nous terminons un avitaillement en fruits et légumes, dévalisons  le rayon "palmiers "  de la boulangerie, passons les derniers coups de téléphone, envoyons les derniers mails....
En balade, Patrick récupère un bambou d'environ sept mètres dont quatre seront utilises  en guise de tangon pour notre génois, au cas où les vents dominants viendraient  par l'arrière, mais tout cela sera une nouvelle histoire...