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S.D.F.

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De la burle aux alizés

Saltimbanques Des Flots

La Barbade, l’île à découvrir.

Lorsque nous mouillons dans la baie de Bridgetown, au sud-est de l’île, notre surprise est de taille. Nous venons de  quitter les mouillages de Martinique et de Sainte-Lucie dans lesquels cohabitaient des dizaines de voiliers et nous voici perdus dans cette immense et magnifique baie en compagnie de trois bateaux français dont deux martiniquais qui nous quitterons dès le lendemain. Mais que se passe-t-il ? Pourquoi les navigateurs ont-ils boudé cette île de l’arc antillais ?

Certes, nous n’arrivons pas en période de fin de transatlantique, l’île est située à l’Est de toutes les autres îles, les mouillages sur la côte Est sont délicats et peu nombreux sous la côte sous le vent mais notre séjour prévu d’une semaine va en durer trois, nous allons parcourir les routes dans les bus locaux, fréquenter les restaurants typiques, assister à des fêtes locales et plonger dans des eaux turquoises, appréciant pleinement la faune et la flore.

L'île de La Barbade est la seule île non volcanique de l'arc Antillais. Elle a été formée suite à des soulèvements tectoniques des plaques et les terrasses qui la constituent sont en roches sédimentaires, mais nos connaissances géologiques ne nous ont pas permis de comprendre toutes les explications (en anglais) reçues lors de notre visite très intérressante des grottes.

La  superficie de La Barbade est de 430 kilomètres carrés, sur 36 kilomètres de long et 24 de large. 275 000 habitants, dont 90% de noirs peuplent cette île, la plupart d’entre eux sont anglicans, jouent au cricket et roulent stoïquement à gauche.  Colonie anglaise, l’île n’a acquis son indépendance qu’en 1966 et conserve donc un esprit « so british », avec son tea-time, ses matches de polo et ses courses hippiques. Non loin du bateau, les chevaux pur sang galopent sur le sable et trottinent dans l’eau jusqu’à l’encolure. Le jeu de dominos est présent à tous les coins de rue, les billets circulent de mains en mains, et la puissance de la pose du domino fait trembler les tables de jeu officielles ou  improvisées. Les bajans  en sont un des peuples les plus joueurs au monde et c’est l’occasion de nous y mettre et de partager avec nos copains de mouillage des parties animées.

La monnaie locale est le dollar barbadien. Il équivaut environ à 35 centimes d’euros. Les fruits et les légumes sont assez dispendieux mais la vie est relativement bon marché, le ticket de bus est à 2 dollars, un repas dans un restaurant à 15 dollars.

Du côté Mer des Caraïbes, des kilomètres de plage bordés de végétation tropicale s’étendent à perte de vue, des hôtels longent ces plages et ont installé leurs transats dans un souci d’esthétisme  et de respect environnemental  remarquable. Côté Atlantique, la côte est plus déserte, rocailleuse et les vagues écumantes sculptent les rochers en d’étonnantes statues tandis que le vent violent couche les moindres petits arbustes rabougris.

La culture de la canne à sucre est très présente dans le centre de l’île qui produit un excellent rhum, le Mount Gay Rum et, lors de la visite d’une distillerie, Patrick peut gouter les mélanges de mélasse à tous les niveaux de fabrication. La bière locale, la Banks, ressemble un peu à la Carib et à la Piton que nous avons testées sur les précédentes îles. Les spécialités culinaires barjanes sont les filets de poissons volants panés et grillés, servis avec du riz aux haricots rouges.

Nous nous risquons également au fast-food "Chefette", présent à chaque coin de rue. Sandwiches au poulet grillé, ailes de poulet cotoient les hamburgers traditionnels. Mais içi, le bœuf ne fait pas recette et le Mac'Donald installé sur l'île a connu la faillite, phénomène assez rare pour être signalé.

Bridgetown accueille, elle aussi, ces grands paquebots et leurs hordes de touristes américains venus dépenser leurs dollars dans les magasins détaxés le long des rues principales.
Les boucles d’or de Patrick, notre attitude de « tourdumondiste », amusent plus les bajans et ils se montrent envers nous d’une gentillesse et d’une serviabilité exemplaire, cherchant à nous faire plaisir et à nous rendre service pour nos menus achats.

C’est aussi ici qu’a lieu ma grande première plongée « palme/masque/tuba » sur trois épaves. Celles-ci sont immergées non loin de la plage et lorsque Patrick et ses compagnons de plongée descendent dans les profondeurs abyssales, je reste en surface et assiste en témoin privilégiée à une représentation féerique.
En effet, l’épave ressemble à un théâtre antique, les escaliers en colimaçon convergent vers le centre de la scène : les poissons trompettes semblent  jouer  une symphonie, les balcons, peuplés de poissons costumés, sont pleins à craquer, tous ont revêtu des habits de carnaval. Pyjamas aux rayures rouges et blanches, habits de Dalton rayés jaune et noir, robes de soirées indigo avec paillettes bleues électrique,  fantômes d’halloween et costumes d’Arlequin. Des ballets de couleurs variées et changeantes sont improvisés pour ce spectacle étonnant, les poissons se déplaçant en groupes, telles des vagues ondulantes portées par le courant.
De temps à autre, une murène sort de son trou, un poisson ange montre le bout de son nez, et tout ce petit monde se jette sans pitié sur la nourriture que nous leur apportons. Sur cette épave se trouvent aussi des hippocampes mais je n’ai pas pu les voir, un jour peut-être, en plongée bouteille.

Voilà donc une belle surprise, un séjour imprévu, un grand coup de cœur pour l’île et ses habitants qui, en plus, m’honorent d’un petit cadeau pour la fête des mères, le 8 mai.