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S.D.F.

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De la burle aux alizés

Saltimbanques Des Flots

Sainte-Lucie, île de verdure.

Notre escale à Sainte-Lucie n’était pas prévue au programme, mais les bons plans s’échangent entre marins : Il suffisait, selon un malin rencontré à Sainte-Anne, d’accomplir les formalités d’entrée et lors de la sortie, de se présenter avec les documents douaniers  à la station d’essence et d’acheter ainsi du gasoil détaxé à 80 centimes d’euros. L’aubaine est alléchante et nous tentons l’expérience.

Lors de nos allées et venues aux Grenadines, nous avons très souvent dormi dans une des belles baies de Sainte-Lucie : Marigot, Rodney…qui évoquent pour nous des mouillages agréables mais  de courtes durées. Cette fois, nous prendrons le temps de descendre à terre et de visiter également l’intérieur de l’île. Nous jetons l’ancre à Rodney Bay, splendide baie abritée, non loin de la pointe du Cap.
Notre première visite est pour la marina de cette ville et notre surprise est grande : nous découvrons ici un petit coin de Floride. Copies conformes mais miniatures, de belles maisons longent les quais, un supermarché identique au « Publix », des marchands de pizzas, de glace, des boutiques d’électronique, de vêtements attendent les touristes,….comme là-bas. Nous hallucinons en mangeant une coupe de glace « Häagen-Dazs »  dans des fauteuils d’un raffinement excessif.

Evidement, quelques mètres plus loin, nous allons trouver la Sainte-Lucie authentique, naturelle, pleine de couleurs, de senteurs et de traditions.
Les habitants parlent l’anglais et le patois. Chose étrange, nous comprenons cette langue proche du créole et du français. En effet, l’île a été plusieurs fois française et n’est devenue définitivement britannique qu’en 1814. Quel choc d’entendre les personnes parler français entre elles, dans les bus, au marché !

Nous visitons, en mini bus public, la côte sous le vent jusqu’à Vieux-Fort.
Les routes sont escarpées, étroites et les chauffeurs intrépides, nous sommes beaucoup secoués et pas très rassurés. Mais le folklore est déjà là : pécheurs circulant avec le poisson pris le matin, paysannes transportant leurs produits, amoureux transis, adeptes de Bob Marley avec rastas descendant jusqu’aux fesses…
Les paysages que nous découvrons sont variés : champs de bananiers, de canne à sucre, manguiers croulant sous le poids de leurs fruits, végétation tropicale luxuriante…
Le village de La Soufrière, sous les pitons jumeaux, est remarquable. Ses ruelles sont animées par des vendeurs en tout genre étalant, à même le sol, les légumes, fruits et produits variés venus dont ne sait où. Le long du port, les alizés sèchent le linge, les enfants jouent dans la rue, les hommes rentrent de la pêche.

Sur le chemin du retour, par la côte au vent, nous constatons les dégâts occasionnés par le cyclone Thomas, qui a détruit sur son passage l’automne dernier des plantations, mais aussi endommagé des routes et des ponts. Des travaux de reconstruction sont en cours et ralentissent la circulation. Les villageois en profitent pour proposer leurs légumes par les  fenêtres des bus, les billets et les courges circulent de main en main.
A plusieurs reprises, nous nous rendons au marché de Castries qui est un festival de couleurs, d’odeurs fruitées et épicées, de musique reggae, zouk, soka et calypso.
Choux et noix de coco sont entassés dans des camionnettes pour être vendus, bananes, mangues, fruits de la passion, papayes, fruits de l’arbre à pain, ananas et une multitude de fruits plus exotiques sont exposés sur des bâches ou sur des planches. Les femmes interpellent les clients, les discussions et les marchandages vont bon train, dans un vacarme assourdissant et joyeux, sous un soleil de plomb.

A Castries, des paquebots déversent, comme à Nassau, des  grappes de touristes américains qui envahissent la place Carénage  et déambulent dans les ruelles voisines.
La vie est très peu chère et nous achetons pour l’équivalent de quinze euros une montagne de fruits que nous stockerons dans nos filets attachés sur le bateau. Le tour de l’île en minibus nous a couté 6 euros. A ce tarif, pas d’horaire, le minibus démarre de la station de départ lorsqu’il est plein et ne s’arrête  en route que sur demande. Le repas au restaurant local ne coute que 2.5 euros, et le W4O grand modèle, 6 euros (réservé aux connaisseurs).

Cette semaine se prolonge, entre baignades et sorties à terre, glaces et repas locaux, avec ce sentiment de connaître un peu plus cette île et d’en apprécier pleinement le sourire et la gentillesse de ses habitants.